La littérature mexicaine n'est pas spécialement une lubie dont j'aurais été infecté depuis le Salon du Livre. Ceci sera le dernier livre de la vague, pour l'occasion, de publication de février/mars que je chroniquerai. C'est juste que j'éprouve depuis quelques mois un intérêt renouvelé pour les formes littéraires courtes et que Phébus est simplement un éditeur qui nous a proposé depuis un certains temps de très bonnes publications.
Ce recueil de 14 nouvelles, pour la plupart datées de 1984 (les exceptions seront précisées) commence très mal. "Lilly" est une nouvelle plutôt écoeurante que je n'ai pas envie de raconter. Une de ces insupportables histoires que j'ai considérée, au premier abord comme une envie délibérée de la part de l'auteur de choquer. Si les nouvelles suivantes avaient été l'application renouvelée et systématique de ce genre d'attitude qui me répulse franchement, vous n'auriez pas cet article sous les yeux. Heureusement ces treize premières pages ne m'ont pas rebuté au point de refermer le recueil sans aller plus loin. Parce qu'elle est en fait de compte, et dans toute sa cruauté, cohérente avec les histoires qui suivent.
Comme l'indique le titre du recueil, celles-ci dépeignent la vie d'un quartier. Le personnage du docteur Del Rio, homme disons... perfectible, revient dans plusieurs d'entre elles mais chacune raconte à sa façon la violence, les confrontations et la chaleur de ses rues. L'une semble empreinte d'une étrangeté morbide et allégorique ("Ultimatum violet"), l'autre se révèle, sur deux pages, être une joyeuse fantaisie surnaturelle ("Rogelio", que certains d'entre vous pourront lire in a secret place). "Invaincu" et "Une question d'honneur" (1983) illustrent le besoin viril de trouver sa place parmi les autres. La femme y est victime, maltraitée ("Lilly" ainsi que "195" et ses dénouements abjects dus à des actions masculines, cruauté enfantine ou paranoïa subtilement narrée), dévouée ("La Veuve Diaz") mais aussi objet de désir, de désespoir et de sérénité ("En paix", 1989).
Comme il devenu coutume de le faire, je m'attarde sur celles qui ont ma préférence. Dans "Rogelio", déjà mentionnée, le personnage éponyme est mort mais ne l'accepte pas et erre dans les rues diffusant son amitié post-mortem. "La Nouvelle-Orléans" et son géant fou de douleur inexprimée qui effraie le quartier avec sa bouteille et sa fureur, incomprise de ses voisins. Et surtout "Le Visage effacé" et son narrateur révolté qui, au contraire de ses parents, entretient le souvenir de sa soeur décédée (à rapprocher, dans sa façon de traiter du deuil, d' "Une toile de Hopper" dans Les Grands Espaces de Fabien Pichon).
Mexico Quartier Sud se lit très vite et multiplie les procédés narratifs (alternance de points de vue, paragraphes courts, soliloque décousu...). Malgré une violence crue et parfois dérangeante, on peut discerner quelques éclats d'humour désabusé. Au final, un recueil honnête qui ne mérite pas le sort, mensuel, inévitable et pourtant sain pour leur boutique, auquel de nombreux libraires l'ont déjà condamné. Et j'en fait malheureusement partie.
Mexico Quartier Sud, Guillermo Arriaga, Phébus, 16€. Traduit de l'espagnol (Mexique) par Elena Zayas.
1 commentaire:
chez moi le sort de mes livres se joue chaque semaine.. j'en deviens aigrie : (
sinon j'ai adoré l'extrait de Rogelio.. on sait pourquoi !
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