"Rana Toad", ça se mange?

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mardi 27 décembre 2016

  Pour plaire au grand nombre, la radio jouait la sécurité jusqu'à tutoyer l'insipide. Alors que la foule sortie du ghetto un samedi soir voulait danser jusqu'à l'épuisement. Aucun disc-jokey de sound-system digne de ce nom n'aurait frayé avec les chansons les plus diffusées par la radio jamaïcaine et seules les plus soul parmi celles-ci pouvaient trouver grâce à ses yeux: le rhythm'n'blues, le merengué ou le latin-jazz le plus enflammé; le mento le plus salace; les ballades les plus dramatiques. Naturellement, la radio jamaïcaine ne diffusait jamais les exclusivités des sound-systems, quelle qu'en soit la popularité. En ce temps-là, les ondes étaient la propriété d'un personnel issu des classes moyennes qui aspirait à la "dignité" et méprisait ouvertement tout ce qui était brutal - trop noir -, comme étant à la limite de la musique de sauvage. Plus crucial encore: si les sound-systems avaient diffusés les tubes, cela aurait signifié qu'ils possédaient tous les mêmes disques et où aurait été l'esprit sportif là-dedans? Il régnait dans le milieu du dancehall une concurrence furieuse et la différence entre un disc-jockey et ses adversaires résidait dans les disques qu'il passait, des disques dont les autres n'avaient jamais entendu parler et qu'il était le seul à posséder.

Bass Culture - Quand le Reggae était Roi, Lloyd Bradley, Allia. Traduit de l'anglais par Manuel Rabasse.

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