[...] Il avait passé une nuit pleine de rêves visionnaires de fraternité tandis que sa chère famille se déchirait à l'étage du dessous, loin de son Utopie: un monde coloré plein de guirlandes et d'arbres de mai, d'oiseaux bleus et d'azalées, où l'homme est bon pour son prochain simplement parce que la vie est plus marrante ainsi. Pauvre imbécile de Joe, avec ta cervelle en Meccano et ton monde désordonné... On raconte que quand il était gosse, ses cousins avaient vidé sa chaussette de Noël et remplacé les cadeaux par du crottin de cheval. Joe avait jeté un œil au fond de la chaussette et s'était précipité vers la porte, les yeux brillants d'excitation. "Attends, Joe, où tu vas? Il t'a apporté quoi, le Père Noël?" Si l'on en croit l'histoire, Joe se serait arrêté dans l'entrée pour chercher une longe: "Il m'a apporté un joli petit poney, mais il s'est échappé. Si je me dépêche je pourrais le rattraper."
Et depuis ce jour-là, on dirait bien que Joe a accepté tous les malheurs de l'existence comme des gages de bonne fortune, et toute la merde du monde comme un signe indiquant la présence de poneys Shetland à proximité immédiate, des étalons pur-sang caracolant juste un peu plus loin. Si quelqu'un s'était avisé de lui montrer que le poney n'existait pas, ou n'avait même jamais existé, seulement une blague et de la merde, il aurait dit merci pour l'engrais et planté un potager.
Et quelquefois j'ai comme une grande idée, Ken Kesey, Monsieur Toussaint Louverture. Traduit de l'anglais (Etats-Unis) par Antoine Cazé.
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