Nous entrâmes alors dans ce qu'il est convenu d'appeler l'ère des Souvenirs, une époque étrange dans laquelle nous autres, les résidants du manoir de l'Observatoire, devions ingérer les réminiscences qui s'échappaient de nos esprits et venaient frapper à nos portes respectives, voltiger à travers nos appartements et nous chatouiller les narines pendant notre sommeil. Les souvenirs étaient partout, à cette époque, tapis dans l'ombre, ils nous lorgnaient d'un oeil humide ou restaient en suspens, les uns sur la poignée d'une porte, les autres sur le rebord d'une fenêtre ou sur une tête de lit, amorphes tant l'inactivité leur pesait, essayant désespérément d'attirer notre attention. Nous ne pouvions pas les ignorer, nous avions beau les écouter, les absorber, les avaler, ils étaient toujours là.
L'Observatoire, Edward Carey, Phébus, coll. "Libretto". Traduit de l'anglais par Muriel Goldrajch.
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