Ce deuxième numéro est bien évidemment dans la parfaite continuité du premier, il propose les même rubriques, le même équilibre entre faits divers, études et reportages. C'est ainsi que je peux me permettre de classer les différents articles afin d'éviter les écueils rébarbatifs d'un compte-rendu suivant leur ordre d'apparence.
Commençons par le gros morceau. Le "Dossier Bourreaux" s'ouvre sur "Une Histoire du châtiment" très instructive et pas avare du tout en détails macabres, avec un ton dont on appréciera l'ironie. Isabelle Dumas-Pelletier nous donne également un aperçu intéressant du statut social du bourreau au fil des siècles. Un rôle qui se transmettait de père en fils.
Mais il y eut une exception, et c'est à Eric Yung qu'incombe la tâche de nous présenter l'unique femme bourreau de l'histoire de France, Marguerite Le Pastour qui a réussi à se faire passer pour un homme pendant des années. Démasquée par une soubrette qui voulait s'élever socialement en s'acoquinant avec le bourreau...
"Matricule 0835333" (par Julie Brafman) est le numéro attribué à Debra Milke, condamnée à mort en 1991, accusée d'avoir commandité le meurtre de son fils de quatre ans. Toute la haine qu'elle a encaissée depuis ne tient qu'à des aveux non enregistrés mais qu'auraient entendus l'inspecteur Armando Saldate.
Dominique Cellura laisse "La parole au bourreau" Fernand Meyssonier, dernier exécuteur en Algérie française. Cellura a connu personnellement cet être très spécial et nous en dresse déjà le portrait quelques pages plus tôt dans "Ces messieurs du petit matin". Meyssonier raconte sa formation auprès de son père et les détails valent le détour.
Le dossier se conclut avec la deuxième mini-BD de la revue, rubrique qu'elle a déjà promis d'être récurrente. De la main d'Alice Bunel, elle ne présente seulement que trois couleurs: le blanc, le noir et le rouge pour une farce morbide mais qui reste paradoxalement bon enfant.
Regroupons ensuite les faits divers relatés "à la Bellemare":
-"Crime à Lacaune" par Philippe Motta: le braquage raté de cinq jeunes d'un village du Tarn, vite reconnus puisque tout le monde s'y connait. Un acte stupide généré par l'ennui. nous avons également
-"Mamie Couteau" (par Michel Mary) dresse le portrait d'une grand-mère sans scrupule qui a poignardé son petit-fils pour se venger d'une bru qu'elle trouvait indigne de son fils.
-"La dépeceuse du Rouge-Cloître" par Paul Lefèvre où comment Viola, dévorée par une passion incontrôlable va se débarrasser de son mari.
-Au rayon tueurs en série, Marie-Lys Lubrano relate dans son "Mystère du triangle maudit", comment treize affaires de jeunes femmes assassinées sont reliés en une, et comment celle-ci n'est toujours pas résolue depuis 1984, date du premier meurtre.
-"Naissance & destin d'un pyromane" se penche sur le cas d'Emmanuel, son passé et les motifs de ses agissements. Jean-Charles Marchand retranscrit fidèlement des extraits du procès.
-Bernadette Caille s'est chargée dans "La malle à Gouffé" de rappeler un fait divers de la fin du 19è siècle, à la façon d'un reportage photo. Les clichés sont d'époque et le dernier conclut ces pages d'une note ironique.
Un fait divers qui n'eut pas autant d'impact dans l'Histoire que l'assassinat de Trotski dont j'ai appris les circonstances dans "Le Roman noir de Ramon Mercader", par Vladimir Fédorovski.
Autre page historique que les passionnés du passé connaissent déjà, le cas de Gilles de Rais, que Patrick Banon (d'une humeur plus moyenâgeuse que biblique cette fois-ci) qualifie de "complot judiciaire" ("Pourquoi Gilles de Rais était innocent").
J'effectue un quatrième regroupement, à savoir celui des reportages ou études sur des thèmes bien particuliers.
Je commence avec Thierry Levèque qui nous livre un constat sur la prostitution à Paris avec "Le Pacte des esclavagistes". Prenant l'exemple de trois femmes et des évolutions du "plus vieux métier du monde", ces pages relatent des réalités que l'esprit populaire parisien relativise à l'aide de "ricanements et sourires entendus". Et si les flics brillent par leur humanité dans les pages de La Cristaine (voir la rubrique "Histoires de bitume"), ici trois d'entre en prennent pour leur grade. Un éclairage juridique vient compléter le tout.
Encore plus effrayant, le papier de Patricia Fagué, "Trafic d'enfants" met en lumière des transactions plus que douteuses, chiffres à l'appui.
Deux pages statistiques, "La France malade de ses prisons" méritent d'être citées brièvement, c'est-à-dire le temps d'écrire cette phrase.
Dans "Quand la presse dérape", Rémy Bellon illustre son propos avec l'affaire Lady Di. Il revient quinze ans après sur cet évènement qui a réveillé tout le monde après un été habituellement tranquille pour les journalistes. Il se souvient de ce capharnaüm médiatique, ou les rumeurs se disputaient avec la désinformation.
"Les Nouveaux empoisonneurs", par Christophe d'Antonio, oppose les intrigues policières à la réalité en affirmant que le poison est utilisé dans la société moderne plus comme un moyen de se servir d'autrui que de s'en débarrasser.
Audrey Goutard quant à elle se pose une intéressante question, est-il possible de nos jours, pour un malfaiteur, de disparaître sans laisser de traces? "Attrape-moi si tu peux" rappelle les cavales les plus récentes et les interventions d'Olivier Dupas (patron de la Brigade Nationale de recherche des fugitifs, BNRF) nous donne une idée de la réponse. Mais ce n'est pas le seul tête-à-tête de la revue.
Comment oublier Dominique Verdeilhan, l'auteur de l'article le plus poignant du premier numéro de la revue? Cette fois, il nous relate le parcours d'Olivia Cligman dans "Le plus de la juge pianiste". Une plongée dans le monde judiciaire magnifiquement illustrée par Claire Eisenzopf. Un des points forts de cet article est le mariage de la dualité musicienne/juriste non seulement dans les mots du journaliste mais aussi dans les illustrations.
Eric Yung est très bien placé pour reparler, dans "Caillol et moi", de l'Affaire Jean-Edouard Empain, enlèvement de ce riche industriel qui eut lieu en 1978. Ancien flic, c'est lui qui eut face à lui pendant quelques secondes intenses, l'un des kidnappeurs, Alain Caillol.
J'approche de la fin avec un rapide survol des rubriques récurrentes.
J'avais particulièrement aimé la rubrique "4 Lieux, 4 Histoires" avec les tranches d'expérience de Claude Cancès dans le n°1. C'est Martine Monteil, femme au parcours non moins impressionnant que son prédécesseur, qui nous livre les siennes. Des lignes très rudes (attentat au RER Port Royal, tueurs en série et braqueurs ultra-violents) sous lesquels pointe une sensibilité qui reste lucide.
"Planète Crimes" nous emmène brièvement dans six pays différents avec des aperçus socio-juridiques concernant entre autres un footballeur suisse corrompu, une loi sur le viol au Maroc ou des pirates somaliens incarcérés aux Seychelles. Au début de la revue on en trouve le pendant franco-français avec "Brèves France".
Patricia Fagué revient dans "#crimes 2.0", rubrique internet, en tant que créatrice du site http://www.personnedisparue.com. Pour l'anecdote ce site, cette volonté d'aider, est en lien direct avec Perdu de vue émission jadis présentée par le controversé Jacques Pradel. En effet, Patricia Fagué en a été stagiaire.
"Le Coin des polars" est constitué de quelques chroniques qui ont le mérite de ne pas présenter des titres déjà exposés par les médias généralistes.
Et enfin les brèves bios de chaque chroniqueurs auxquelles il est toujours utile de se référer pour vérifier la crédibilité de la revue.
Mes derniers mots (ou presque) seront pour saluer le beau boulot des illustrateurs. Dans l'ordre d'apparition: Alice Bunel, Luxio, Henri Nay, Alexandre d'Huy, Catherine Deux, Claire Eisenzopf, Nabla, Thomas Périno, Eluart Barajas, Pierre Roy-Camille, Victor Eremita, Roj, Grégoire Massamba, Daniel Bastide, Paul Schmir. Au vu de cette longue liste vous pouvez vous faire une idée de la diversité des talents, sans compter que certains d'entre eux apparaissent deux fois et pas toujours dans le même style (Bunel, Luxio, Eisenzopf, Roj).
Le n°3, prochainement. Après la sortie du n°4, certainement, je me connais....
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