Voici la suite d'un roman que j'ai malheureusement raté à sa sortie en poche, Les Falsificateurs. J'ai donc eu la joyeuse surprise de découvrir sur la 4ème de couverture que ce second opus pouvait être lu séparément grâce à un résumé de plusieurs pages.
Antoine Bello invente une agence spéciale répondant au doux nom de Consortium de Falsification du Réel (CFR). Référence à 1984 et à la littérature d'anticipation des années 50? Peut-être. On y apprend que le héros, Sliv, a été pris dans une machination ayant pour but de lui faire croire qu'il avait tué un homme afin de tester sa motivation à rester dans l'organisation.
Mais l'originalité qu'apporte l'auteur est de ne pas faire du CFR un énième ersatz de la CIA ou autre roman d'espionnage.
Le rôle du CFR est de recruter des scénaristes ou falsificateurs afin de créer des dossiers pour faire avancer des causes: peuples minoritaires contre un gouvernement ou fournir des preuves, bidonnées ou non, pour justifier ou non des conflits.
C'est justement autour des évènements du 11 septembre que se concentre l'action et les enjeux moraux de ce tome.
Comment en effet justifier moralement l'action consciente et supposée d'un agent allant dans le sens de la mise en branle de la seconde guerre du golfe?Mais quel est au fait le but et l'historique du CFR?Le héros l'apprendra bien tard, ce qui ne fera qu'accentuer sa désillusion!
Le mérite d' Antoine Bello est d'apporter plusieurs point de vue sur la situation géopolitique: le héros est en effet entouré de Youssouf, un musulman modéré tiraillé entre sa foi et son amitié pour le héros, Maya, une jeune femme mariée à une famille d'intégriste, Lena, dont le manque de reconnaissance professionnelle supposée et ses sentiments non avoués pour le héros ne sont jamais réellement abordés frontalement (et tant mieux car je déteste les love story qui finissent en happy end!) et un agent islandais peut motivé par les responsabilités.
Les Éclaireurs est réellement un roman surprenant qui fait la part belle aux initiatives et aspirations morales de chacun, dont le rythme effréné entraîne dans un enchaînement d'action et de circonstances qui permet difficilement de deviner le dénouement.
J'ai noté des passages particulièrement croustillants: sur la manipulation de groupuscules anarchistes pas forcément vindicatifs afin de renforcer la cohésion d'une nation naissante autour d'un même ennemi (bande à Bader après la chute du Mur de Berlin, comme quoi un anarchiste ça peut toujours servir!) ou sur les conversations d'une amie du héros avec un groupe de jeunes idéalistes pour aider un peuple que le héros à contribuer à aider par des arrangements avec un gouvernement grâce à un de ses premiers scénarios!
Ce roman a remporté le Prix du livre France Culture / Télérama 2009.
Antoine Bello, Folio, août 2010.
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