Ils exécutèrent ainsi plusieurs morceaux à la suite, Claude adaptant son jeu de manière à donner le plus de soutien possible à l'enfant. De temps à autre, lorsque l'occasion s'en présentait - quelques mesures de piano solo - , il mettait un peu de sentiment dans l'espoir de susciter plus de souplesse chez Peter, mais l'enfant semblait ne rien entendre. La dernière pièce, un Schubert très simplifié, comportait un passage à l'unisson. Claude le joua rubato pour faire ressortir la forme de la ligne.
L'enfant fronça les sourcils, leva son archet à mi-course. "Pardon? Je ne vois rien, fit-il en scrutant sa partition. Ne sommes-nous pas censés être ensemble, ici?"
La mère et l'enfant fixèrent Claude - Peter authentiquement perplexe, madame Fisk en alerte, le visage impassible. Un moment, Claude fut tenté de dire la vérité, mais lorsqu'il ouvrit la bouche pour parler, il sut que l'enfant ne comprendrait pas, que la mère recruterait sans doute quelqu'un d'autre pour l'accompagner. "Désolé, murmura-t-il, j'ai fait une erreur. Reprenons au début de la page."
Corps et âme, Frank Conroy, Gallimard. Traduit de l'anglais par Nadia Akrouf.
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