Ce bruit, on aurait dit... je me rappelle avoir pensé ça... un peu le même que la petite à Joe, Souricette, la fois qu'elle était revenue de la grange au pas de course en hurlant que son petit chat préféré s'était noyé au fond du bidon de lait et où est passé tout le monde? elle ne pleurait pas ni rien, elle faisait que hurler mon petit chat s'est noyé où est passé tout le monde? Impossible de la calmer avant qu'elle ait couru dans toute la maison et parlé à tout le monde et vu tout ce qu'il y avait à voir. C'est exactement la même idée qui m'a traversé l'esprit en entendant crier cette oie perdue: elle ne demandait pas juste où était passé son troupeau, non, elle voulait savoir où était passé le fleuve, et puis la berge, et absolument tout ce qui avait un rapport avec son existence. Où est passé mon monde à moi? voilà ce qu'elle voulait savoir, et où je suis, moi, si je ne peux pas le localiser? Elle avait perdu son chemin et elle survolait le fleuve, complètement déboussolée à la recherche de son monde. Elle essayait de se repérer vite fait et de remettre chaque chose à sa place, comme Souricette en avait éprouvé le besoin après la mort de son chaton, et comme moi qui voulais revoir ces fichues grumes. Sauf que moi, je n'arrivais même pas à comprendre ce que je croyais avoir perdu: pas le moindre chaton auquel me raccrocher, et j'étais incapable de dire si j'avais perdu mon troupeau... ni même si j'avais jamais eu un but dans la vie. Mais n'empêche, je reconnaissais bien cette sensation...
Et quelquefois j'ai comme une grande idée, Ken Kesey, Monsieur Toussaint Louverture. Traduit de l'anglais (Etats-Unis) par Antoine Cazé.
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