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lundi 8 février 2010

Ghost in the machine : Exit le fantôme de Philippe Roth

Il y’a de longs mois de cela je ruminais quelque part par là à propos d’un brillant auteur américain vieillissant traitant de la vieillesse avec une pénible désinvolture de pétomane. (http://ranatoad.blogspot.com/2009/04/that-joke-isnt-funny-anymore-une.html) Dans la même lignée (celle des brillants auteurs américains vieillissant), Philippe Roth se livre au même exercice avec nettement plus de brio au travers d’Exit le fantôme, sorte de pseudo-testament littéraire de Nathan Zuckerman, son double fictionnel de toujours.

Contraint à un retour à New-York pour y soigner sa prostate défaillante après des années de réclusion volontaire à la campagne, Zuckerman va faire la rencontre de trois personnages qui incarnent ou réveillent, chacun à leur manière, ses plus anciens démons : un jeune écrivain aussi arriviste qu’encombrant ; la vieille compagne affaiblie d’un auteur défunt qui fut aussi son mentor littéraire ; mais surtout une très très jeune femme (intelligente et belle, cela va de soit) dont Zuckerman s’éprend, lui qui se croyait revenu de tout.

De ces rencontres-miroirs, ou -abîmes (le plus sûrement les deux), et avec pour toile de fond le New-York post-11 septembre qui fait politiquement écho à la désillusion qui a suivi, 40 ans plus tôt, la mort de Kennedy (voir du côté de De Lillo ou du Vineland de Pynchon), Roth-Zuckerman, tout en se tenant, non sans un certain cynisme, légèrement à distance de tout imbrication politico-sociologique, se livre à un inventaire des obsessions d’un vieil homme, plus qu’accessoirement écrivain : l'impact de la littérature, la postérité et le sort réservé à une oeuvre une fois son auteur disparu ; la déchéance physique avec pour corollaire la fuite de la mémoire ; et ce qu’il advient alors des fantasmes et de la libido, incontournables moteurs de création…

Loin d’être le meilleur de Philippe Roth, mais un livre plaisant, à la fois ludique et amer.

Exit le fantôme, Philippe Roth, Gallimard 2009, 327 pages. Traduit de l’américain par Marie-Claire Pasquier

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