J'ai plusieurs fois manifesté auprès de mes collègues la nécessité de l'écriture d'un guide susceptible d'orienter les jeunes auteurs se plaignant parfois, lors des dédicaces en librairie, des obstacles qu'ils ont du surmonter pour se voir enfin publier et en vivre.
Les Éditions Le Dilettante ont l'excellent idée de publier ce guide de François Nourrissier datant de 1956! L'auteur utilise avec brio la forme épistolaire afin de dépeindre les rouages ambivalents du monde littéraire français. Un jeune auteur plein d'espoir et d'amour pour son art entreprend de correspondre avec l'auteur qu'il apprécie le plus. Celui-ci refuse de le rencontrer, cela serait inutile selon lui, mais lui répond dans une longue lettre afin de lui expliquer tous les pièges et subtilités de "la grande famille" dans laquelle il s'apprête à entrer!
Il définit premièrement trois types d'auteurs: les professionnels (ceux qui visent les prix littéraires, les postes faciles comme l'Alliance Française, les profiteurs et proches des syndicalistes), les cuisiniers, qui suivent un modèle de style ou de genre et enfin les amateurs proches des cercles d'influences.
Dans une deuxième partie il développe le carnet d'adresses et les intrigues de cour à absolument connaître si l'on souhaite être publié et perdurer. L'Alliance Française, les syndicats, La Revue Esprit, L'Express, Gallimard , Les temps modernes, L'observatoire, le Théâtre Populaire, La Table Ronde ou Denoël.
Dans une troisième partie il marque bien la différence entre la para critique, qui fait de l'auteur un personnage "people" avant l'heure comme Le Figaro Littéraire ou Les Nouvelles Littéraires, et la vraie critique ou comment repérer les journalistes intéressants et les bonnes rubriques.
Enfin il prévient le jeune auteur idéaliste des dangers du rapport à l'argent et aux femmes, du rôle social des belles voitures et de l'importance du savoir faire.
Il est amusant de constater à la lecture de ces précieux conseils que le monde fantasmé par le grand public amateur de livre et les auteurs idéalistes n'a guère changé!
A noter en supplément la réédition du plateau du Jeu de l'oie de petit homme de plume dessiné par Maurice Henry! A mon sens le livre essentiel de la Rentrée Littéraire!
Extraits:
" La république des lettres, c'est la république des camarades."
" Le whisky et l'à-valoir sont les deux appâts capables d'attirer l'auteur. L'auteur est donc venu. On a organisé une battue et tiré quelques salves. Plusieurs victimes sont tombées mais l'on n'a pas encore osé achever les blessés."
" Les Parisiens tiennent maquis dans les beaux quartiers. Maîtresses et amants, ils les choisissent de bonne compagnie. L'accusation est venue comme une consécration: dandysme. Elle était formulée, comme toujours, par des agrégatifs affamés de chic anglais. On a cru alors que le dandysme était dans le trait d'écriture, voire dans le vêtement. On a pensé à tout sauf à la liberté. Tâtez de ce dandysme-là; on vous le pardonnera moins facilement que les autres."
" Le whisky et l'à-valoir sont les deux appâts capables d'attirer l'auteur. L'auteur est donc venu. On a organisé une battue et tiré quelques salves. Plusieurs victimes sont tombées mais l'on n'a pas encore osé achever les blessés."
" Les Parisiens tiennent maquis dans les beaux quartiers. Maîtresses et amants, ils les choisissent de bonne compagnie. L'accusation est venue comme une consécration: dandysme. Elle était formulée, comme toujours, par des agrégatifs affamés de chic anglais. On a cru alors que le dandysme était dans le trait d'écriture, voire dans le vêtement. On a pensé à tout sauf à la liberté. Tâtez de ce dandysme-là; on vous le pardonnera moins facilement que les autres."
François Nourrissier, Le Dilettante, août 2009.
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