Dans une ville indéfinie et à une époque qui pourrait être la nôtre une étrange épidémie fait rage : définie comme "le mal blanc" par les médecins elle rend aveugle (on voit blanc au lieu de noir) sans que l'on en comprenne son mode de propagation ni le remède. Les malades semblent être frappés au hasard et bientôt le gouvernement doit prendre une décision radicale : la quarantaine. Les "contaminés" et les suspects de le devenir sont confinés dans les deux ailes d'un hôpital psychiatrique désaffecté au confort sommaire (WC à la turc, canalisations d'eau rebelles ...) et laisse tout ce beau monde à lui-même.
Combien de temps vont-ils passer ainsi? Comment cohabiter quand on est brusquement handicapé? Les pires affres de l'être humain ne tardent pas à se révéler : un groupe se forme et décide de rationner la nourriture et exige en échange dans un premier temps tous les bijoux de l'autre camp ... puis leurs femmes.
Au milieu de ce chaos une femme conserve mystérieusement la vue, elle va être le témoin mais aussi la personne qui aidera les survivants à sortir dans une ville abandonnée par le gouvernement dans laquelle l'être humain est retourné à son état animal.
Saramago, Prix Nobel de littérature bizarrement! , pose la question de ce que l'être humain peut faire si personne n'est là pour le juger, des lâchetés (un homme vole la voiture du premier aveugle en prétextant de l'aider) à la bestialité mais aussi l'espoir de la reconstruction à travers la conscience de la femme restée voyante.
Le plus intéressant est sans conteste le style. La narration saute d'une focalisation à une autre: sans marque de dialogue, tirets et guillemets, on passe d'un personnage à l'autre comme s'il s'agissait d'une conscience collective dans de longues phrases.
Extrait (juste pour le style car se n'est pas un passage représentatif du livre):
" Ils savaient qu'il leur faudrait aller jusqu'à la clôture extérieure pour prendre les caisses que les soldats, fidèles à leur promesse, laisseraient entre le portail et l'escalier, et ils craignaient un stratagème, une chausse-trape, Qui nous dit qu'ils ne vont pas se mettre à nous tirer dessus, Après ce qu'ils ont déjà fait, ils en sont bien capables, nous ne pouvons pas nous fier à eux, Moi je ne sors pas dehors, Moi non plus, Il faudra bien que quelqu'un aille dehors si nous voulons manger, Je ne sais pas s'il vaut mieux mourir d'une balle ou mourir de faim à petit feu [...] "
" Ils savaient qu'il leur faudrait aller jusqu'à la clôture extérieure pour prendre les caisses que les soldats, fidèles à leur promesse, laisseraient entre le portail et l'escalier, et ils craignaient un stratagème, une chausse-trape, Qui nous dit qu'ils ne vont pas se mettre à nous tirer dessus, Après ce qu'ils ont déjà fait, ils en sont bien capables, nous ne pouvons pas nous fier à eux, Moi je ne sors pas dehors, Moi non plus, Il faudra bien que quelqu'un aille dehors si nous voulons manger, Je ne sais pas s'il vaut mieux mourir d'une balle ou mourir de faim à petit feu [...] "
José Saramago, Point Seuil, 2008.
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire