"Rana Toad", ça se mange?

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dimanche 18 septembre 2016

The Three Investigators 13.The Secret of the Crooked Cat (1970)/Les Trois Jeunes Détectives 12.Le Chat qui clignait de l'oeil (1974)

1.The Secret of Terror Castle/1.Au Rendez-vous des revenants.
 
  Comme je l'ai déjà signalé, alors que les éditions françaises de la série des Trois Jeunes Détectives suivait l'ordre chronologique des éditions originales, la Bibliothèque Verte a commencé à chambouler tout ça à partir de 1973. Ainsi le onzième tome original, The Mystery of the Talking Skull (1969), n'a été publié en France qu'en 1984, en 26ème position, sous le titre Le Crâne qui crânait. Le douzième tome original, The Mystery of the Laughing Shadow (1969), s'est retrouvé quant à lui publié sous le titre L'ombre qui éclairait tout (1983), une année plus tôt, à la 25ème position. Le lecteur français des années 1970 n'a donc pas eu l'opportunité de lire la série dans son véritable ordre. Cependant, je tiens à préciser que, pour l'instant, je n'ai pas trouvé d'éléments perturbant la continuité.
  Dans l'ordre original, les deux tomes suivants sont The Secret of the Crooked Cat et The Mystery of the Coughing Dragon. Ils ont été tout deux publiés en France à la suite du Trombone du Diable (1973), mais inversés, c'est-à-dire que Le Dragon qui éternuait (1973) a été publié avant Le Chat qui clignait de l’œil (1974). Je n'ai pas repéré non plus d'éléments problématiques en ce qui concerne la continuité de la série.

1.Continuité temporelle.

  En élaborant une chronologie à partir des indications temporelles données par Robert Arthur au fil des tomes, j'ai pu estimer que, même si cela reste approximatif, l'action des tomes 1 à 6 se déroule en juillet et que celle des tomes 7 à 11 se déroule en août. Petite entorse, William Arden avait, dans, The Mystery of the Laughing Shadow, parlé d'hiver, ce qui me paraissait un peu trop éloigné de ce que The Mystery of the Talking Skull indiquait (sans mois précisé, il faisait encore très chaud).
  Troisième contribution de William Arden dans la série des Three Investigators, The Secret of the Crooked Cat/Le Chat qui clignait de l’œil remet les personnages sur les rails de cette chronologie interne avec deux indications précises:

  "On an afternoon in early September..."/"On était tout au début de septembre." (Chapitre 1)
  "If they hadn"t been in Southern California in early September..."/non traduit (Chapitre 7)

2.Caractérisation: "Fellows" et "Jiminy".

  Tout en gardant la même caractérisation des personnages, s'inscrivant totalement dans l'univers créé par Robert Arthur, William Arden avait manifesté une sorte de manie, celle d'utiliser le terme "fellows" dans le dialogue des trois personnages principaux. J'avais concédé que sans être un détail extrêmement important, il fallait que je vérifie et analyse cette propension. J'ai donc relevé toutes les occurrences où le mot "fellows" était utilisé et j'en avais compté 17 en tout dans les deux premières contributions d'Arden. The Secret of the Crooked Cat/Le Chat qui clignait de l'oeil établit un record puisqu'on trouve le mot à 44 reprises (vous vous amuserez à en repérer quelques dans les extraits cités tout au long de cet aricle!) que j'ai pu répartir ainsi:
-Jupiter 26 fois,
-Andy 10 fois,
-Bob 6 fois,
-Peter 2 fois.
  La majorité pour Hannibal s'explique en partie car étant leader, c'est lui qui amorce souvent le mouvement, l'encouragement à avancer dans l'enquête.
  Du point de vue de la traduction, voici les choix de Claude Voilier:
-Non traduit 29 fois,
-"Mes amis" 10 fois,
-impératif à la première personne du pluriel ("Dépêchons-nous", "allons voir" et "allons, détectives") 3 fois,
-"Tous ensemble" 1 fois,
-"Les copains" 1 fois.
  Même si la majorité des occurrences n'est pas traduite, Claude Voilier garde la notion d'une cohésion de groupe. Il n'est logiquement pas employé lorsque les quatre personnages sont séparés en deux groupes de deux (du Chapitre 16 au Chapitre 19). Je n'ai pas vraiment besoin d'approfondir davantage.

  Andy/Ronny Carson est fils d'un directeur de cirque itinérant et est l'ami temporaire du trio pour ce tome. Une des particularités de ce personnage est son exclamation très récurrente, "Jiminy". Si je m'en réfère à l'étymologie, il s'agirait d'une forme profane, vulgaire apparue vers 1803, de "Gemini", terme lui-même déformation de "Jesu domine" ("Seigneur Jésus"). Cela aurait encore dérivé aux environs de 1848 en "jiminy cricket" (ou "jiminy Christmas", évocateur de "Jesus Christ"). C'est Disney qui trouve Jimini Cricket comme équivalent pour le personnage de Pinocchio, à l'origine sobrement appelé Il grillo Parlante ("le grillon qui parle") en italien.
  Il n'existe pas d'équivalent avéré de "Jiminy" en français. Sur les 9 occurrences du mot, Claude Voilier choisit 5 fois de ne pas le traduire et le remplace de quatre fois différemment:  "ça alors!", "voyons", "ma parole" et "ma foi". Même si le contexte peut apporter des nuances, il aurait été préférable d'utiliser une même exclamation équivalente en français à chaque reprise, car elle est une caractéristique propre au personnage d'Andy/Ronny.

3.Références aux tomes précédents:

  Mais revenons-en à la continuité et une des choses qui permet d'en constituer une bien solide est de faire référence à d'anciennes enquêtes du sympathique trio. The Secret of the Crooked Cat/Le Chat qui clignait de l’œil en comporte deux importantes.
  Au Chapitre 8, au milieu des réflexions de Jupiter/Hannibal, on trouve ceci:

  "[...] the crooked cats, taken all together, mean something."
  "You mean like all the parrots in our 'Stuttering Parrot' case, First?" Bob said quickly.
  Bob was referring to a case the boys had handled in which a group of parrots had each been taught part of a message that helped solve a mystery."
Jacques Poirier, 1974.
  "[...] les chats [...], pris ensemble, ils signifient quelque chose!
  -Tu veux dire... comme dans le cas du "Perroquet qui bégayait?" demanda vivement Bob.
  Le jeune garçon faisait allusion à un mystère que les détectives avaient eu à débrouiler et dans lequel, au sein d'un groupe de perroquets, chacun des oiseaux avait appris un fragment de message. Le message, reconstitué, donnait la clé de l'énigme."

  Au passage, signalons que Jacques Poirier, premier illustrateur français de la série dessine régulièrement,  même s'il n'est pas mentionné dans le texte, Blackbeard, le mainate que les détectives ont gardé depuis cette enquête (il apparait dans une autre illustration un peu plus bas).

  Le Chapitre 22, l'épilogue, rappelle également le partenariat entre nos trois amis et le réalisateur Alfred Hitchcock. Dès le premier tome, Hitchcock s'est engagé à écrire une introduction à chaque enquête si elle en vaut la peine, bien évidemment. C'est une mise en abyme propre à la série et il est dommage que Claude Voilier en supprime la référence:

  "The next day, after Bob had written up the report of the case, the boys took it to their friend and mentor Alfred Hitchcock. The famous director read it, and immediately agreed to introduce the case for the boys once more."
Jacques Poirier, 1974.
  "Le jour suivant, après avoir consigné par écrit les différentes phases de l'affaire des chats qui clignaient de l’œil, les détectives allèrent trouver leur ami Alfred Hitchcock. Le célèbre metteur en scène lut avec intérêt leur rapport."

4.Personnage de Jupiter/Hannibal:

a.Son passé de comédien.

  Dans le Chapitre 4, Claude Voilier omet également une information importante donnée par Robert Arthur dans The Secret of Terror Castle et que William Arden s'est attaché à rappeler dans ce treizième tome. C'est une information dont j'ai suivi les allusions avec beaucoup d'assiduité: Jupiter a joué dans une série télévisée quand il était petit. Le premier traducteur, Vladimir Volkoff avait lui aussi jugé qu'il n'était pas utile de partager ça avec les lecteurs français... en tout cas dans Au Rendez-vous des Revenants. Car il a changé d'avis dans le cinquième tome, The Mystery of the Vanishing Treasure/L'Arc-en-Ciel a pris la fuite en gardant l'allusion qui y était faite.

  "A very good act," Jupiter declared. "Did you see how it all built up to the sad clown finally smiling? People enjoy that, the sad one having a moment of victory. When I was in the movies I worked with clowns. These are very good."
  People were sometimes surprised by Jupiter's knowledge of the movies and TV. They forgot that the First Investigator had once been a child performer under the name of Baby Fatso. It was a name Jupiter didn't like to be reminded of now, but he liked to display his knowledge of show business."

Jacques Poirier, 1974.
  "Voilà un excellent numéro, déclara Hannibal. Avez-vous remarqué qu'il est construit autour du sourire final du grand dadais? Les gens aiment bien voir triompher au bout du compte ceux qui n'ont pas eu de chance... 
  -Mais le grand clown n'a pas réellement triomphé! objecta Bob.
  -Sans doute, mais son compère ayant raté son tour, cela les rapproche. C'est en quelque sorte la revanche de la médiocrité sur la supériorité arrogante.
  -Ce que tu parles bien Babal!" soupira Peter, admiratif.
  Quand il le voulait, Hannibal était très capable de raisonner en adulte. Il ne manquait pas de psychologie."

  Non seulement l'allusion au passé de Jupiter est gommée, mais en plus la traductrice fabrique un dialogue que je trouve un peu forcé. L'analyse de Jupiter sur le spectacle des clowns aurait mérité meilleur traitement puisqu'elle trouve un écho dans le Chapitre 21:

  "The small, fat clown peeled off his mask and putty nose to reveal a smiling Jupiter.
  "I always wanted to be a clown," Jupe said."

  "Le petit clown, brusquement, ôta son masque à gros nez... Hannibal, souriant, parut aux yeux de tous.
  "Je viens de réaliser le rêve de ma vie, dit-il plaisamment... Me mettre dans la peau d'un clown!"

b.Ses inventions.

  William Arden s'est donc appliqué à rappelé la facette "divertissement" de Jupiter (souvenez-vous par exemple de son imitation d'Alfred Hitchcock dans le premier tome). Mais une autre facette du personnage se manifeste dans The Secret of the Crooked Cat/Le Chat qui clignait de l’œil: Jupiter/Hannibal est un très bon bricoleur et il va jusqu'à inventer, fabriquer des gadgets pratiques aux enquêtes qu'il mène avec ses compagnons.
  Dès le premier Chapitre, Arden précise donc en quelque lignes, une de ces particularités propres du détective en chef:

  "Jupiter, the First Investigator of the boys' junior detective firm, liked to keep his inventions secret until he was sure that they would work. He hated to fail. He also hated to stop one of his projects before it was finished."

  "Hannibal, le directeur de l'agence des "Trois Jeunes Détectives", gardait ses inventions secrètes jusqu'au moment où il était sûr qu'elles fonctionnaient. Il avait horreur de l'échec. Et il avait tout autant horreur de laisser un travail en plan..."

  A partir de cet extrait, je vais pouvoir développer, intégrer ici ce que je voulais à l'origine aborder dans un article annexe. Les inventions de Jupiter/Hannibal méritaient une mise en lumière et jusqu'à maintenant, je n'avais pas eu l'opportunité de le faire. Vous allez voir que les extraits choisis sont totalement cohérent avec les propos d'Arden. Nous seulement je cite des extraits concernant directement les inventions, mais vous pourrez également repérer par-ci par-là des allusions aux traits de caractère de Jupiter/Hannibal.
  Dans le Chapitre 6, les détectives attendent l'arrivée d'Andy/Ronny dans leur Quartier Général. Ils utilisent une invention bien particulière. Dans l'illustration de Jacques Poirier (mainate inclus) ci-dessous, Peter guette l'arrivée d'Andy/Ronny:

  "A short while later Pete was again watching the salvage yard through the See-All. "Here he comes, fellows!"

  "Un instant plus tard, Peter, l’œil collé à l'oculaire du Voit-Tout, annonça aux autres:
  "Voilà Ronny qui arrive! Attention!"
Jacques Poirier, 1974.
  Il faut remonter au troisième tome de la série, The Mystery of the Whispering Mummy/La Momie qui chuchotait pour retrouver l'origine de ce gadget. Dans le Chapitre 3 dudit roman, Robert Arthur nous en livrait les détails:
 
Harry Kane, 1965.
  "What seemed to be an ordinary length of small diameter stovepipe, ran up through the roof of the trailer. It ended in an elbow, and had two small pipes attached to it for handles. Looked at closely, it resembled the lower end of a submarine periscope - which was not surprising, for it actually was a crude but efficient periscope Jupiter had made the previous week.
  Headquarters was still a secret to the outside world, hidden as it was by artfully placed piles of salvage materials. However, one drawback to the secrecy had become apparent. No one could see the hidden trailer, but once the boys were inside, they could not see out.
  Jupiter had remedied this by building the periscope, which he named the "See-All". Made out of stovepipe with mirrors installed at angles in it, it rose through the roof close to the ventilating hatch. Anyone looking at it would see only an ordinary stovepipe."

  "Dans un angle, le toit de la caravane était percé. Un tuyau de poêle coudé passait par l'ouverture. A la partie inférieure, il était équipé de deux poignées qui permettaient de lui imprimer un mouvement de rotation. On aurait dit un périscope de sous-marin... Rien d'étonnant: c'était en effet un périscope réalisé par les soins d'Hannibal.
  Le P.C. des Trois jeunes détectives, invisible pour les non-initiés, avait tout de même un gros défaut: lorsque les détectives y étaient enfermés, ils ne pouvaient rien voir de ce qui se passait à l'extérieur.
  Hannibal y avait remédié en construisant son périscope, qu'il appelait "panoramique", au moyen de quelque bouts de miroirs placés à angle droit dans un tuyau de poêle, qui avait l'air le plus innocent du monde."

  Dans le même Chapitre, Bob et Peter attendent leur chef. Ils ont en l'absence de Jupiter/Hannibal eu vent d'affaires potentielles et le voyant arriver grâce au See-All, ils pensent pouvoir s'amuser avec lui. C'est aussi dans cet extrait que le walkie-talkie est utilisé pour la première fois:

  "He's walking his bike back from town. Must have had trouble - Yep, his front tyre is flat."
  "Probably ran over a nail," Bob suggested. "That's what took him so long. Does he look grouchy?"
  "No, he's listening to a transistor radio and smiling." Pete observed. "that's funny. I mean, Jupe hates to have things go wrong - even a flat tyre. He takes it as a reflection on his efficiency. Jupe likes to plan ahead so that everything goes as smooth as silk."
Jacques Poirier, 1967.
  "Il pousse sa bicyclette. Le pneu avant est à plat.
  -Il a dû crever, commenta Bob. C'est cela qui l'aura mis en retard. Je parie qu'il a l'air furieux.
  -Pas du tout. Il écoute un poste à transistors, et il sourit tant qu'il peut. Ça, c'est curieux. Babal déteste les contretemps. Même une crevaison, ça le vexe à mort. Il veut toujours que tout marche comme sur des roulettes."

  C'est grâce à ce walkie-talkie que Jupiter, qui n'a pas prévenu ses compères de cette invention, retourne la blague contre eux:

  "How do you know about the whispering mummy?" Pete almost shouted.
  "While you have been boning up on deduction." Jupiter said, "I have been boning up on mind reading."

  "Peter hurla:
  "Qui t'a raconté l'histoire de la momie?
  -Pendant que vous vous entraîniez à la déduction, répondit Hannibal, moi, je m'entraînais à la télépathie, c'est-à-dire à la transmission de pensée."

  La blague continue dans le Chapitre 4:

  "How did you know about the letter from Mr. Hitchcock, telling us about Professor Yarborough and his whispering mummy?" Pete demanded half an hour later for the fifth time.
  Jupiter Jones sighed. "If you don't believe me I'm a mind reader, you will have to it figure out for yourself," he said."

  "D'où sais-tu que M. Hitchcock nous a écrit que le professeur Yarborough avait une momie parlante?" demanda Peter pour la vingtième fois.
  Hannibal Jones soupira:
  "Si tu ne me crois pas quand je te dis que je suis télépathe, toi qui es si fort pour la déduction, tu n'as qu'à raisonner un peu."

  Dans le Chapitre 5, le détective en chef juge nécessaire l'utilisation du walkie-talkie dans le cadre de l'enquête en cours et Peter découvre comment son chef le faisait marcher. Bien évidemment, ce roman date de 1965, Peter parait donc bien naïf. A l'ère des téléphones portables et d'Internet, ce passage parait bien dépassé:

  "[Jupiter] took the case Pete handed him and unlocked it. Throwing back the lid, he revealed what looked like three oversized transistor radios.
  Jupiter did not like to give explanations when he could demonstrate instead. Now he handed one of the radios to Pete. From the case he took a leather belt with copper wire sewed to it, and fastened this round Pete's waist. He plugged in a lead-in wire from the belt to the little radio and handed it to Pete.
  "Open the window and walk out in the terrace, then through the gardens," he said. "Hold the radio to your ear and pretend to be listening to it. But press this button on the side and talk instead. To listen, let up on the button."
  "But what is it?" Pete demanded.
  "It's a walkie-talkie," Jupiter said. "The copper belt is your antenna. It has a sending and receiving range of half a mile, using the Citizen's Band for transmission. I decided we needed some way to keep in touch with each other if we ever got separated on a case, so I started making these last week." [...]
  "Well, okay," Pete agreed. He shot a glance at the First Investigator. "So this is how you did your mind reading!" he blurted out.
Jacques Poirier, 1967.
  "[Hannibal] prit la mallette des mains de Peter et l'ouvrit. Il en retira trois objets qui ressemblaient à des récepteurs de radio à transistors, d'un format supérieur au modèle de poche.
  Hannibal détestait donner des explications quand il pouvait faire une démonstration. Il tendit l'un des postes à Peter. Puis il lui passa une ceinture de cuir complétée par un fil de cuivre. Il brancha sur l'appareil un fil électrique relié à la ceinture.
  "Va te promener dans le jardin, commanda-t-il. Tiens le poste près de ton oreille. De temps en temps, appuie sur ce bouton et parle. Puis, pour écouter, lâche le bouton.
  -Qu'est-ce que c'est que ce machin-là? demanda Peter.
  -Un walkie-talkie, autrement dit un poste émetteur-récepteur portatif, répondit Hannibal. La ceinture sert d'antenne. Portée: 800 mètres. Longueur d'onde choisie dans la gamme réservée aux amateurs. J'ai pensé que nous avions besoin de moyens de liaison sérieux lorsque nous opérions chacun de notre côté, et j'ai pensé la semaine dernière à mettre ces appareils au point. [...]
  -D'accord", dit Peter. Puis, l’œil malin, il ajouta: "Voilà donc le secret de ta télépathie!"
Jacques Poirier, 1967.
  Je signale en passant que j'utilise d'autres illustrations de Jacques Poirier même si elles correspondent à des scènes ultérieures de The Mystery of the Whispering Mummy/La Momie qui chuchotait. Il serait superflu de citer plus d'extraits de ce tome, ceux-ci servent très bien mon objectif.
  Sans recopier l'extrait, le See-All est utilisé également au début du Chapitre 12 de The Mystery of the Screaming Clock/Les Douze Pendules de Théodule.
  Mais pour en revenir à The Secret of the Crooked Cat/Le Chat qui clignait de l'oeil, William Arden nous annonçait dans le premier chapitre, via un dialogue entre Pete et l'Oncle Titus, que Jupiter/Hannibal préparait quelque chose:

  "The stocky boy looked glumly at the array of tiny electronic parts on his workbench.
  "Jupe's building a new thingumajig for the Three Investigators," Pete explained to Uncle Titus.
  "A new invention, eh?" Uncle Titus said [...]."What is it, Pete?"
  "Who knows? Gosh, you know Jupiter," Pete explained. "I'm just the helper. Who tells me anything?"

  "Le gros garçon considérait d'un air navré les multiples petites pièces métalliques éparses sur son établi.
  "Babal est en train de construire un nouvelle appareil extraordinaire qui nous servira dans nos enquêtes, crut bon d'expliquer Peter.
  -Une nouvelle invention, hein? fit l'oncle Titus [...]. Qu'est-ce que c'est au juste?
  -Je n'en sais rien! soupira Peter. Vous connaissez Hannibal. Je suis là pour l'aider mais il ne me fait pas de confidences."

  Vous l'aurez compris ces lignes précédent tout juste celles dont je me servais au début de cette sous-partie. Il faut attendre le Chapitre 7 pour que le détective en chef révèle à ses amis sa nouvelle invention. C'est ainsi que William Arden apporte vraiment à la série en faisant évoluer les techniques d'investigations du trio:

  "My dentist's appointment!" Bob groaned. "I forgot." 
  "Jupiter frowned. The First Investigator hated to have his plans interferred with. He sighed.
  "I suppose you'd better go, Records," he said. "We'll start alone. In case we have to leave, or follow someone, we'll take my new directional signals so you can locate us."
  "The new what?" Pete exclaimed.
  "Directional signal and emergency alarm," Jupiter beamed proudly. "It was what I was working on yesterday. Second. I completed it this morning while waiting for you two. I only had time to finish two units, so we'll take one and Bob can take the other. It's just what we need this time. Our walkie-talkies would be too obvious. We mustn't look as if we're watching at all."
  "What does your signal do, Jupe?" Andy wanted to know.
  "First, it's a directional signal," Jupiter explained. "What they call a 'homer.' It bleeps at a steady rate that gets louder and faster as you get nearer to it with another signaller, and there's a dial on it that indicates direction. It's a simple arrow-dial, showing if the signal is coming from right, left or straight ahead. Each unit is a sender and receiver, and they're small enough to carry in a pocket.
  "For emergencies the unit has a small, flashing red light that is activated without even being touched! It works on voice command. When one of us is in trouble, all he has to do is say the world 'help' near the unti, and the red light will flash on the other units!"
  "Jiminy," Andy said with awe. "You can do almost anything, can't you, Jupiter?"
  "Well, Andy"-Jupiter preened for an instant-"I try to keep our investigating work up to date. Our signal can only be picked up by our own units, and the range is three miles."

Jacques Poirier, 1974.
  "Flûte! grommela Bob avec une grimace. Le dentiste! J'avais oublié."
  Hannibal se rembrunit. Il avait horreur de voir ses plans contrariés. Il soupira:
  "Je suppose que tu es obligé d'y aller, Bob! Tu nous rejoindras plus tard. Au cas où nous serions forcés de quitter la foire ou de suivre quelqu'un, nous utiliserons mon nouveau localisateur.
  -Ton nouveau quoi? s'exclama Peter, ébahi.
  -Localisateur! répéta Hannibal avec fierté. C'est l'invention à laquelle je travaillais hier. J'ai achevé de la mettre au point ce matin, en vous attendant tous les deux. Mais je n'ai encore que deux appareils. Nous en emporterons un avec nous, Peter. Bob prendra l'autre. Vu les circonstances, c'est exactement ce qu'il nous faut! Nos walkie-talkies auraient été trop voyants. Mieux vaut passer inaperçus!
  -A quoi sert au juste ton... heu... localisateur? demanda Ronny d'un air intéressé.
  -C'est avant tout un indicateur de direction, expliqua le détective en chef. Il émet des bip-bip qui deviennent plus fréquents et plus forts à mesure que l'on se rapproche d'un autre porteur de localisateur. L'appareil comporte un simple cadran avec une aiguille indiquant si l'appel vient de droite, de gauche ou de devant soi. Chaque localisateur peut à la fois émettre et recevoir. Son faible volume permet de le transporter dans la poche. En cas d'urgence, un petit voyant rouge s'allume. Il n'y a même pas besoin de le toucher. Il obéit à la voix! Si l'un de nous a des ennuis, il n'a qu'à porter l'appareil à sa bouche et crier "Au secours!" le voyant rouge s'allumera aussitôt sur les autres cadrans!
  -Ma parole, Hannibal! Je vais finir par croire que tu sais tout faire! s'écria Ronny. Tu es un génie!
  -C'est-à-dire, expliqua Hannibal en s'efforçant en vain de prendre une attitude modeste, c'est-à-dire que j'essaie de moderniser au maximum nos méthodes d'investigation. Notre localisateur ne peut capter que des localisateurs semblables. Son rayon d'action est de cinq kilomètres environ."

c.Son érudition.

  William Arden ne s'arrête pas à ces deux facettes de Jupiter/Hannibal. Il rappelle au lecteur que celui-ci est un autodidacte, qui s'est principalement constitué une culture générale, un savoir livresque qu'il met volontiers en pratique quand une enquête le lui permet. C'est le cas dans le Chapitre 5, où un premier indice suspect a attiré son attention:

  "[...] So I came back here to look at the trailer cage. Look at this lock."
  Jupiter held the big padlock. "See those deep scratches all around the keyhole? The steel shines in the scratches. This lock has been picked, and not long ago!"
  "Are you sure, Jupe?" Bob asked uneasily.
  Jupiter nodded. "Remember that book we have at Headquarters? The one about evidence and criminal methods? Well, those marks are exactly like pictures in that book of picklock marks!"

  "[...] Je suis donc venu ici regarder ce cadenas de près... Et voyez ce que j'ai découvert... Autour du trou de la serrure, on aperçoit des éraflures brillantes. Ce cadenas a été forcé il n'y a pas longtemps!
  -Tu en es sûr, Babal? demanda Bob.
  -Certainement! Rappelez-vous ce livre que nous avons au Quartier Général. Il traite des méthodes employées par les criminels. Eh bien, ces marques que vous voyez sur l'acier du cadenas sont identiques à celles décrites dans le bouquin au chapitre des effractions."

  Ce même livre est un des accessoires utilisés dans une mise en scène que les trois détectives préparent pour accueillir et impressionner Andy/Ronny dans le Chapitre 6:
  "Jiminy! What a neat place!" Andy cried.
Harry Kane, 1970.
  He stared wide-eyed at the microscope, télephone, periscope, walkie-talkies on the wall, filing cabinets, metal detector, shelves of books and trophies, and all the other equipment the boys had arranged so that Andy couldn't miss it. He looked at Bob and Jupiter, who seemed to be hard at work. Neither of them even glanced up. Jupiter was peering through magnifying goggles at a lock and a book. Bob was studying something under a lighted glass screen.
  Pete said in a low voice, "We know there's something wrong at your carnival, Andy. We're investigating the details."
  "But you can't," Andy said. "You don't know."
  "Science and our training will tell us what you won't, Andy," Pete declared, sounding as pompous as Jupiter.
  Suddenly Jupiter stood up. "A professional criminal released Rajah, fellows," he announced as if unaware that Andy was in the room. "There is no doubt. The indentations on the exterior face of the lock are proximate patterns of a type-seven pick-lock! The purpose was certainly to cause trouble."
  Andy stood and blinked at the stream of words he only half understood. [...]"

Roger Hall, 1971.
"Quel drôle d'endroit!"
  Il regardait avec intérêt le microscope, le téléphone, le périscope, les walkies-talkies accrochés au mur, les classeurs pleins de fiches, le détecteur de métaux, les étagères de livres et les instruments spécialisés que les détectives avaient pris grand soin de mettre en évidence.
  Puis le regard du jeune forain se porta sur Bob et sur Hannibal qui paraissaient fort absorbés par leurs occupations. Aucun des deux ne leva seulement le nez de son travail. Hannibal examinait un cadenas à l'aide d'une loupe. Bob étudiait des brins d'étoffe sur un petit écran de verre éclairé par en dessous. Peter murmura tout bas à son compagnon:
  "Nous savons qu'il se passe des choses suspectes à la foire, Ronny. Nous enquêtons sur certains détails.
  -Mais c'est impossible! murmura Ronny. Vous ne savez rien...
  -La science et notre perspicacité nous apprendront ce que tu refuses de nous dire, Ronny!" déclara Peter d'un ton qu'il voulait aussi pompeux que celui d'Hannibal.
  Au même instant, le chef des détectives se redressa.
  "C'est un professionnel du crime qui a fait évader Rajah, mes amis! annonça-t-il à ses camarades comme s'il ignorait la présence de Ronny dans la pièce. Cela ne fait aucun doute. Les marques autour de la serrure du cadenas sont caractéristiques. Et si l'on a libéré Rajah, c'est évidemment pour causer du gâchis!"
  Ronny écoutait, stupéfait par ce qu'il entendait. [...]"

  Notez que Claude Voilier omet la mention au livre (qui apparait dans les illustrations d'Harry Kane et Roger Hall), rajoute "des brins d'étoffe" du côté de Bob.

  L'un des lieux principaux de l'intrigue dans ce treizième tome est le cirque itinérant appelé le "Carson's Colossal Carnival" que Claude Voilier adapte en "Carson Amusement Park" (ce qui est contestable car la fête foraine de Carson est stationnée à côté d'un parc d'attraction à l'abandon que William Arden désigne comme "amusement park"). C'est l'occasion pour Jupiter/Hannibal de faire part de sa connaissance du jargon employé dans cet univers. Dans un premier temps, quand il rencontre Ivan/Dimitri, le dresseur de lion (Chapitre 1):

  "So, the tubs! Perfect! Give them to me!"
  "The Jones Salvage Yard has what you want," Jupiter said, announcing Uncle Titus's slogan for the yard.
  The Great Ivan laughed. "That sounds like one of our barkers, young man."
  "What's a barker, sir?" Pete asked.
  "Well, son, suppose you try to guess," The Great Ivan said.
  "I'll bet Jupe knows," Bob declared.
  Both Bob and Pete had learned that Jupiter usually knew a little about everything, and the stocky leader of the trio wasn't bashful telling what he knew.
  "A barker," Jupiter now pronounced, "is a man who stands outside a circus or carnival sideshow and tells people how exciting it is inside. You could say it was an ancient form of advertising."
  "Very good, young man," The Great Ivan said. "Sometimes we call them 'spielers' or 'pitchmen', and sometimes they lie, but not the good ones. My barker, for instance, doesn't tell people that Rajah is a ferocious lion, he just tells them some of what Rajah can do. Did you ever see a lion on a trapeze?"

  "Enfin! Des tabourets! Parfait! Donnez-les-moi vite, jeunes gens!
  -Le Paradis de la Brocante peut fournir tout ce qu'on lui demande!" récita Hannibal.
  C'était là un échantillon des phrases chères à l'oncle Titus. Dimitri Ivanov se mit à rire.
  "Vous parlez comme un de nos aboyeurs, jeune homme.
  -Un "aboyeur"? qu'est-ce que c'est, monsieur? demanda Peter.
  -Eh bien, tâchez de deviner..., proposa Dimitri.
  -Je parie qu'Hannibal le sait!" s'écria Bob.
  Peter et lui s'étaient depuis longtemps aperçus que le chef des détectives connaissait un tas de choses et n'était pas fâché, le cas échéant, d'étaler sa science.
  "Je suppose qu'il s'agit d'un bonimenteur, expliqua-t-il sans se faire prier. C'est un homme qui se place à proximité d'une attraction, ou à l'entrée d'un chapiteau, et qui attire la foule en lui vantant la qualité de l'attraction ou l'intérêt du spectacle. Disons que c'est une des formes les plus primitives de la publicité.
  -Bravo pour l'explication, jeune homme! lança le Grand Ivan. Ces bonimenteurs doivent avoir une langue bien pendue pour engager les gens à entrer. Il arrive que certains mentent en promettant au public plus qu'il ne lui est offert en réalité. Mais ceux-là ne comptent pas parmi les bons. Celui qui me présente, par exemple, ne raconte pas aux gens que Rajah est un lion féroce. Il leur dit seulement ce qu'il est capable de faire. Avez-vous jamais vu un lion sur un trapèze?"

  Si le lecteur désire une mise en pratique, une démonstration de ce dont un bonimenteur est capable, il est remarquablement bien servi par le fils Carson au Chapitre 3:

  "Andy grinned and put a straw hat on his head. "Not so fast, young man. Your eagerness to test your skill is admirable, yes it is, but first it is necessary to cross my palm with silver, coin of the realm, legal currency to the amount of twenty-five cents, the fourth part of a dollar. A mere trifle for five big shots. Step up, my boy, everybody wins. Show your steady hand and keen eye. Give the man room, please. Five little hits wins the big prize, the one-and-only amazing crooked cat!"
  The boys laughed, and Pete dug into his pocket for a quarter.
  "Gosh," Bob said, "do you always talk like that, Andy?"
  Andy beamed. "My Dad says I've got carnival in my blood. He says I'm a natural spieler."
  "You sure are," Bob said. "Can you teach us?"
  "Ah, my boy," Andy intoned, his face solemn, "it is first necessary to study long years with the Great Lama of Nepal. At the appropriate moment, after that, some small instruction could be made available for a modest fee. Only a selected few, of course, can be permitted the honour-"
  Grinning, the boys listened as Andy spiled on in a fantastic performance of flowery words. Andy, too, grinned as he talked, pleased with his verbal ability.
  "But now," he concluded with a flourish, "stand aside, give the young nimrod room to show his skill. Fire at will, Pete!"
Jacques Poirier, 1974.
  "Ronny sourit, se colla un petit un petit chapeau de paille sur le crâne et se lança dans un boniment destiné à attirer la foule:
  "Un instant jeune homme! Je comprends votre impatience à montrer votre adresse... Ici, tout le monde gagne! Regardez un peu la beauté de nos lots... Allons, messieurs dames, laissez les coudées franches à notre tireur d'élite..."
  Il continua ainsi, entremêlant son discours de plaisanteries qui faisaient rire les spectateurs groupés autour du stand. C'était à coup sûr un excellent bonimenteur. Il jonglait avec les mots, gesticulait. Enfin il s'arrêta et invita Peter à tirer."

  Vous ne rêvez pas, le texte français est bel et bien raccourci, Claude Voilier ayant préféré transposé la verve d'Andy/Ronny dans la narration. On y perd beaucoup, non? D'ailleurs, je vais me pencher de plus en plus sur le travail de la traductrice par la suite.
  Avant de revenir au jargon du cirque qui n'a plus de mystère pour Jupiter/Hannibal, je trouve amusant de vous citer un extrait qui aurait pu se placer plus haut dans sa facette "divertissement" mais que je n'ai pu, pour une question de cohérence, que placer ici. Un peu plus loin dans le même chapitre, Andy/Ronny doit laisser son stand un instant, laissant l'occasion au chef des détectives de s'improviser bonimenteur... avec son petit succès:

  "Jupiter, you get behind the counter and watch the booth while I go and get some globes. Pete and Bob can help me carry some," Andy said.
  "Sure, Andy," Bob agreed. "Go on, Jupe."
  Jupiter needed no urging. He went behind the booth counter at once and began trying to spiel like Andy. The growing crowd seemed to enjoy the chunky boy's performance, and Jupiter beamed with pleasure."

  "Hannibal, dit-il vivement, passe derrière le comptoir et garde le stand un moment, veux-tu?... Le temps que j'aille chercher les globes! Peter et Bob pourront m'aider à en transporter quelques-uns si ça ne les embête pas...
  -Bien sûr que non, Ronny! assura bob. Prends vite sa place, Babal!"
  Hannibal n'avait pas besoin qu'on le presse. Il passa derrière le comptoir sans se faire prier et, sur-le-champ, se mit à "bonimenter" à la manière de Ronny. Les badauds semblèrent prendre grand plaisir à ses discours. Le chef des détectives en fut tout heureux."

  Mais étant toujours dans la partie traitant de l'érudition de Jupiter/Hannibal, il me reste encore à vous citer le second extrait où sa connaissance du jargon du cirque itinérant se manifeste. Il se trouve dans le Chapitre 2, alors que le trio de détectives fait la connaissance d'Andy/Ronny Carson:

  "[...] The boy grinned. "I'm Andy Carson. I work this booth. Are you fellows with it?"
  Bob blinked. "Are we what, Andy?"
  "He means," the always ready Jupiter explained, "are we carnival people, from some other carnival. No, Andy, we lived in Rocky Beach. I'm Jupiter Jones, and they're Bob Andrews and Pete Crenshaw."
  "Glad to meet you, fellows," Andy said, and added proudly, "I'm with it. A full operator, not just a punk or a roughneck."
  "Huh?" Pete said.
  "A 'punk'," Jupiter interpreted for the others, "is an apprentice member of the carnival, and a 'roughneck' is a manual workman. Andy means he's just like a proper adult performer in the carnival. That's pretty unusual, isn't it Andy?"

  "Il sourit de nouveau et se présenta:
  "Je m'appelle Ronny Carson. Mon père m'a chargé de tenir ce stand. Êtes-vous aussi des gens du voyage?"
  Peter ouvrit de grands yeux:
  "Des gens du quoi? demanda-t-il.
  -Il veut dire des gens de cirque... ou encore des forains, expliqua Hannibal... Non, Ronny. Nous habitons ici, à Rocky. Je m'appelle Hannibal Jones et voici Bob Andy et Peter Crentch.
  -Ravi de vous connaître! dit Ronny. Moi, je suis un vrai forain; pas un simple apprenti. A seize ans, j'ai les même fonctions qu'un adulte... et cela me fait bien plaisir."

5.Traduction.

a.Hiérarchie du cirque - "Roughneck".

Jacques Poirier, 1974.
  Andy/Ronny établit par ses propos une hiérarchie.  Outre sa maîtrise du boniment dans le chapitre qui suit (il rapporte que son père dit qu'il est "a natural spieler", ce qui correspond avec les mots employés par Ivan/Dimitri dans le Chapitre 1), Andy/Ronny se place clairement au-dessus des fonctions qu'il désigne par "punk" et "roughneck".
  Si vous comparez les extraits ci-dessus, vous pouvez déjà voir des différences dans la traduction. Dans la réponse d'Andy/Ronny n'apparaissent que les équivalents de "full operator" ("vrai forain") et de "punk" ("apprenti"), le sens de ce dernier pouvant être déduit des explications de Jupiter... qui sont omises par la traductrice. Pour expliquer le terme "roughneck" à Bob et Peter, Jupiter parle de "manual workman", ce qui peut être traduit par "ouvrier manuel". Vu la fréquente utilisation du terme "roughneck" par William Arden tout au long du roman, j'ai voulu voir, comme avec "fellows" et "Jiminy", comment Claude Voilier avait choisi de le traiter et ainsi de rendre compte de la hiérarchie du cirque Carson. Dans cette première occurrence du terme, Voilier a déjà décider de l'ignorer.
  Jetons un œil sur les autres occurrences:

  -Chapitre 5:
  "I was off helping the roughnecks"/"J'étais à l'autre bout du terrain, en train d'encourager un de nouveaux bonimenteurs!".
  M. Carson donnait un coup de main aux ouvriers dans le texte original. Voilier susbtitue "roughneck" avec "bonimenteur" ce qui était, on l'a vu, l'équivalent choisi pour "spieler".
  -Chapitre 8:
  "[...] among the booth and tents where the roughnecks and the booth operators were repairing [...]"/[...] parmi les baraques où les bonimenteurs s'exerçaient et où les forains, transformés en ouvriers, effectuaient ici et là de menues réparations."
  Le mot "ouvriers" est bien employé pour "roughneck", mais Voilier ajoute la présence des bonimenteurs. Pourquoi pas? On peut accepter de bon gré leur présence car elle ajoute à l'ambiance général du passage. Par contre, le texte français ne reconnait pas vraiment la hiérarchie. Là où le texte original mentionne "roughnecks"/"ouvriers" ET "booth operators"/"forains" (qu'Andy/Ronny plaçait au-dessus des "roughnecks"), donnant l'idée d'une entraide entre deux catégories d'employés, Voilier donne plutôt l'impression que les forains (équivalent d'"operators") s'improvisent dans une fonction qui n'est pas la leur.
  -Chapitre 10:
  "Some of the roughnecks are tatooed.."/"Certains de nos bonimenteurs portent des tatouages."
  Là aussi, c'est l'équivalent de "spieler" qui est choisi par la traductrice.
  -Chapitre 15
  "Mr Carson was shouting orders to his crew of roughnecks."/"M. Carson criait à pleine voix des ordres à une armée d'aides."
  "Aide" est un bon équivalent. On peut chipoter sur l'emploi d'"armée", "équipe" aurait suffi à mon sens.
  -Chapitre 20:
  "Rougnecks were working feverishly with levers to raise the carousel back on a level"/"Des forains, transformés en manœuvres, s'activaient à redresser le manège avec des leviers" (Chapitre 15).
  "Manoeuvres" est encore mieux qu'"aides"! Pour plus de cohérence, c'est ce mot qui aurait du être employé à chaque occurrence par Claude Voilier. Mais ici, elle fait la même chose qu'au Chapitre 5.
Jacques Poirier, 1974.
  -"The crowd of police and roughnecks all turned to look."/non traduit.
  -"... a roughneck said."/"...déclara un jeune forain." On peut arguer que le terme "forain" peut être employé indéfiniment, mais c'est au détriment de la hiérarchie évoquée par William Arden.

  Je tiens à préciser que je n'adresse pas de reproches à Claude Voilier. J'apprécie juste de pouvoir constater et analyser son travail. Je suppose que si elle l'avait pu, elle m'aurait justifié ses choix. Je ne suis pas traducteur professionnel, je manifeste juste mes désaccords quand la traduction, ou l'adaptation exerce une distorsion de ce que je perçois du texte américain.

2.Oralité - L'accent de Konrad.
  Un autre exemple de distorsion que j'ai régulièrement remarquée au fil des tomes, et pas seulement du fait de Claude Voilier, est le traitement de l'accent d'Hans et Konrad, les deux employés bavarois de l'oncle Titus. Je suis assidument leurs apparitions et à défaut d'avoir pu leur consacré une série d'articles comme pour d'autres personnages secondaires, je les intègre à chaque fois que j'ai l'occasion d'aborder l'oralité de certains personnages (la plupart non-américains). Robert Arthur leur a prêté un accent à coupé au couteau (phrases courtes, syntaxe et grammaire approximatives...) qui n'est pas toujours bien retranscrit par les traducteurs.
  Les deux frères bavarois apparaissent rarement tous les deux à la fois. Les Trois Jeunes détectives emploient l'un ou l'autre au fil des apparitions. Ici c'est Konrad qui va leur filer un coup de main. Sa participation est relativement longue et vous pourrez le voir dans une scène du Chapitre 13 que j'ai isolée dans un article annexe (voir "Le Tatoué s'échappe!"). Il y a deux répliques que j'ai jugées bon de citer parce que la traduction française prêtait une meilleure syntaxe, une façon de parler beaucoup plus châtiée que ne le veut le texte original. Tout d'abord, dans le Chapitre 12, Peter s'inquiète de l'absence de ses acolytes et se rend au Paradis de la Brocante:

  "Have you seen Bob or Jupiter, Konrad?" Pete cried out to the big Bavarian helper of Uncle Titus Jones.
  "I don't thing I see them for a long time today, Pete, " Konrad replied Stolidly. "There is something wrong?"

  "Avez-vous Hannibal et Bob, Konrad? demanda Peter à l'employé de l'oncle Titus.
  -Non, répondit le Bavarois. Ça fait même un bon bout de temps que je ne les ai aperçus. Y aurait-il du vilain, par hasard?"
Jacques Poirier, 1974.
NOTE: on peut voir Konrad à droite sur l'illustration de Jacques Poirier. La scène se situe littéralement entre les deux répliques extraites: Pete tient à la main l'un des localisateurs qui lui permet de retrouver ses amis.

 Le second exemple se trouve dans le Chapitre 13:

  "Konrad, who had been standing silently by all this time, now stepped up to Jupiter and broke in.
  "We now call the police, Jupiter."

  "Konrad, qui s'était tenu à l'écart jusque-là, sortit brusquement de l'ombre et s'avança.
  "Il faut faire appel à la police, Hannibal! déclara-t-il. Nous n'avons déjà que trop attendu."

  Vous pouvez constater l'ajout ainsi qu'une syntaxe trop propre pour le personnage.
 
3.Les changements de nom - "Human Fly".

  Je compte aussi parmi les distorsions tous les ajouts, omissions, contresens etc. Il y a des dizaines d'ajouts et d'omissions que je pourrait citer, mais il suffit d'observer les extraits cités dans cet article pour en trouver des exemples. Au fil de la série, il y a aussi régulièrement des changements de noms pas toujours justifiés. J'ai déjà signalé: Andy/Ronny (celui-ci est facilement justifiable, pour ne pas confondre avec le nom "français" de Bob), The Great Ivan/Dimitri Ivanovitch, "Carson's Colossal Carnival"/"Carson Amusement Park".
  Dans The Secret of the Crooked Cat/Le Chat qui clignait de l’œil, un personnage est doublement victime de cette modification arbitraire. Il est fait mention de Gabbo/Gario pour la première fois dans le Chapitre 12, par  la bouche d'Andy/Ronny:

  "Look at this, fellows. I found it all just dropped on the floor."
  Bob held up a pair of strange, black overalls that were cut very narrow, like tights; a black hoodlike head covering that fitted a whole head but left the face open; and a pair of black canvas shoes with odd rubber soles that looked a little like curved suction cups.
  Jupiter frowned. "It looks like some kind of costume, Records. Perhaps a carnival costume, but I don't recall any costume like that. And?"
  Andy was staring at the black garments with a puzzled expression. He took them and studied them.
  "Well, what is it, Andy? Jupiter wanted to know.
  Andy shook his head. "None of our people wears a costume like this, but-" The carnival boy hesitated, shook his head. "I can't be sure, fellows, but I think this looks a lot like a costume the Amazing Gabbo used to wear."
  "The Amazing who?" Bob said, staring.
  "Gabbo," Andy said. "When I was just a little kid, [...], my Dad worked a little while with a small circus near Chicago. The Amazing Gabbo worked in the show, too, for a few days. We never knew him, really, and he wasn't around long. I only remember him because he was caught stealing from the circus and fired. I think he got into worse trouble later and went to prison."
  "Prison?" Jupiter said quickly. "Then he could be a thief! Did he look like that tattooed man, Andy?"
  "I don't know, Jupe. I guess his age is about right. But I wouldn't remember what he looked like. I don't think Dad would, either. I mean not right away unless someone told him to look for Gabbo. I guess we really never saw him out of his costume."
  "And this looks like his costume?" Jupiter asked.
  Andy nodded. "It sure does, I think. And those shoes are a special kind used by human flies in their acts. You know, so they can climb almost any wall."
  Jupiter gaped. "A human fly?"
  "Sure," Andy said. "That was Gabbo's act. He-"
  But Jupiter was no longer listening. "That old man who tried a grab your crooked cat last night! He got out of that dead-end area. The only way out was to climb that high fence. No one could climb a fence like that - except, maybe, a trained human fly!"
Jacques Poirier, 1974.
  "Regardez, mes amis! J'ai trouvé ça entre une boîte et le mur du fond!"
  Il exhibait une sorte de combinaison très collante, noire, qui, une fois enfilée, devait mouler tout le corps. Il y avait aussi pour compléter ce costume très spécial, une cagoule, noire elle aussi, qui laissait le visage à découvert, et enfin une paire de sandales noires dont les curieuses semelles de caoutchouc ressemblaient à des ventouses.
  Le front du détective en chef se plissa...
  "On dirait une espèce de déguisement! Peut-être s'agit-il d'un travesti de carnaval... ou d'un costume de parade!... Ronny! Cela te rappelle-t-il quelque chose? Un de vos forains ne porte-t-il jamais un truc de ce genre?"
  Ronny ne répondait pas. Il considérait les effets noirs d'un air extrêmement intrigué. Puis il les prit en main et les regarda de plus près.
  "Eh bien! Ronny?" dit Hannibal avec impatience.
  Le jeune Carson secoua la tête:
  "Personne, à la foire, ne porte un costume semblable à celui-ci, mais... Écoutez! je ne pourrais pas le jurer, mais ce costume ressemble beaucoup à celui que portait Gario, l'Araignée Humaine!
  -L'Araignée Humaine? répéta Bob, surpris.
  -Oui!... expliqua Ronny, [...]. A l'époque, je n'étais encore qu'un enfant. Mon père travaillait alors près de Chicago. [...] Gario, l'Araignée Humaine, s'exhibait dans son cirque. Il n'y est pas resté longtemps. Papa et moi, nous l'avons en fait très peu connu. Cependant, je me souviens de lui car il a été chassé, à la suite d'un vol dont il s'était rendu coupable. Je crois me rappeler que, par la suite, il a encore eu des ennuis avec la justice et qu'il a fait de la prison.
  -De la prison? répéta vivement Hannibal. Ce serait donc sans doute un voleur? Est-ce que ce Gario ressemblait à l'homme tatoué, Ronny?
  -Je ne saurais te le dire, Babal! Comme âge, cela correspond, me semble-t-il. Mais je ne me rappelle pas bien Gario. Papa ne le reconnaîtrait pas davantage, je pense. Ou alors il faudrait qu'on stimule sa mémoire d'une façon ou d'une autre. Vous comprenez, nous n'avons pratiquement jamais vu Gario sans son costume.
  -Un costume qui ressemblait tout à fait à celui-ci? demanda Hannibal.
  -Tout à fait, oui! [...] Les chaussures, surtout, sont caractéristiques. Il n'y a que les araignées qui s'en servent... pour monter le long des murs... [...]
  -Une araignée humaine? répéta Hannibal, sidéré.
  -Oui. On appelle aussi ce genre d'acrobate: "Homme Araignée". En tout cas, c'est ainsi que Gario se faisait appeler! Il grimpait le long d'un mur avec une aisance qui..."
  Mais Hannibal ne l'écoutait plus!
  "Le voleur moustachu! s'écria-t-il. Celui qui t'a volé ton dernier chat, Ronny! Rappelez-vous la façon dont il nous a échappé! Il s'est précipité dans un cul-de-sac! La seule manière de se sauver était de passer par-dessus la haute palissade. Eh bien!... personne n'aurait pu y arriver... sauf un acrobate entraîné à se jouer d'obstacles semblables!"

  Ainsi The Amazing Gabbo, la "Mouche Humaine" pour William Arden se transforme en Gario, l'"Homme Araignée". Après tout, une mouche autant qu'une araignée s'accroche et grimpe tout aussi bien aux murs, ce n'est une erreur de la part de la traductrice. On peut peut-être tout au plus lui reprocher d'évoquer le super-héros Spider-Man déjà présent dans l'imaginaire collectif.

4.Bizarreries.

    Dans le rayon des petites libertés que s'accorde Claude Voilier, j'ai relevé dans de précédents articles des choix de traductions qui me laissaient perplexe. La réplique d'un personnage passe à un autre, du dialogue passe en narration ou le contraire etc. Ici il y a encore plus amusant, des choses un peu bizarres qui ne peuvent pas être involontaires.
  Premièrement, au Chapitre 10, Claude Voilier s'amuse en s'accordant un jeu de mots de son cru par le biais d'Hannibal:

  "[...] but first we have to see what he does with the cats he has, and if he finds - "

  "[...] Mais auparavant, essayons de savoir ce que notre homme fait des chats qu'il a en sa possession. Et si nous le découvrons, alors... chat ira."
  
  Le deuxième exemple se déroule dans le Chapitre 7, où la visite de Bob chez le dentiste n'est pas une scène inutile pour l'intrigue:

  "Bob arrived at his dentist to find him busy with an emergency patient, so he had to wait."
  
  "Quand Bob arriva chez son dentiste, on le pria d'attendre un peu, le praticien ayant été retardé par une urgence."

  A première vu ce "on le pria" n'attire pas trop l'attention, mais par la suite, il y a quelque chose de plus surprenant:
Jacques Poirier, 1974.
"Bob jumped up. The description exactly  fitted the crooked cat Pete had won - and then lost - last night! Bob tore out the advertisement and ran to the door of the dentist's inner office.
  "Doctor! I have to go," he cried, and before the dentist could protest, he was running out towards his bike."

  "Bob fit un bond! La description de l'annonce correspondaiut exactement au chat que Peter avait gagné - et perdu - la veille!
  Bob déchira hâtivement l'annonce et se rua vers la porte à l'instant précis où l'assistante du dentiste venait l'informer que c'était son tour de passer dans le cabinet.
  "Excusez-moi! lança-t-il à la jeune fille. Je suis obligé de partir!"
  Et, avant qu'elle ne soit revenue de sa surprise, il était déjà dans la rue et enfourchait son vélo..."

  J'ai trouvé amusant cet ajout d'un personnage intermédiaire avec le dentiste qui n'existe pas sous la plume de William Arden. Mais c'est aussi l'opportunité de signaler l'humour de Jacques Poirier. Si vous observez bien l'illustration ci-dessus, des détails font sourire: l'enseigne du dentiste c'est "Kenott et Moller" ("Quenotte et Molaire") et la rue d'à côté s'appelle "Carry Street" ("Carrie"). Ce sont des jeux de mots très faciles, mais ça me fait penser au procédé adopté par le magazine d'humour américain Mad, ces pancartes qui parfois changeaient même d'une case à une autre. En France, dans les années 80, Maëster, l'un des collaborateurs de Fluide Glacial (créateur notamment de Sœur Marie-Thérèse des Batignolles) s'en inspirera beaucoup.
  
  Le second exemple que je voulais mettre en lumière se déroule plus tôt, dans le Chapitre 2, juste après la collision entre le voleur et Jupiter/Hannibal (qui est en lui-même un cas très intéressant, comme vous pourrez le voir dans l'article annexe intitulé "Un mauvais perdant?"):
Harry Kane, 1970.
  "Jupiter staggered up again, crying out, "After him!"
  The boys raced after the fleeing thief, followed by the two carnival guards. The moustached man ran towards the ocean and disappeared behind a jutting corner of the high wooden fence that surrounded the abandoned amusement park. The guards caught up with the boys."
Edition finnoise.
Edition espagnole.





















  "Arrêtez-le!" hurla Hannibal aux gardes.
  Ceux-ci se ruèrent en avant, suivis des Trois jeunes détectives. L'homme aux lunettes noires courait droit vers la plage. Il disparut au coin de la haute palissade de bois qui clôturait l'ancien parc d'attractions. Les gardes ralentirent."
Edition suédoise.
Edition polonaise.














  

  
  En lisant bien ces lignes, la scène originale voit les jeunes détectives poursuivre le voleur suivis des deux vigiles ("caught up" signifie "les ratrapèrent"). Or, la scène traduite par Claude Voilier rend compte du contraire, ce sont les deux vigiles qui partent avant et le trio suit (ils "ralentirent", sous-entendu, le trio arrive derrière).

  Je me suis d'ailleurs permis d'insérer différents illustrations de couvertures d'un peu partout, car c'est la scène qui a été choisie le plus souvent. Une constante est que n'apparaissent que nos trois amis et le voleur. Ajoutons-y encore la version de Robert Adragna qu'une édition indonésienne a reprise de façon presque similaire.
Robert Adragna, 1981.
Edition indonésienne.

















  L'autre constante de toutes les couvertures ci-dessus est l'aspect donné au chat en peluche si central à l'intrigue. Tous les illustrateurs se sont mis d'accord: le chat est roux tigré de noir et c'est une peluche relativement grande. Il apparait aussi dans deux éditions britanniques, illustrant une autre scène que vous pouvez voir dans l'article annexe intitulé "Pete face au lion Rajah."

5.L'aspect du chat - Le titre français.

  Parmi les illustrations de couvertures qui figurent le chat de façon différente se trouvent les trois éditions françaises. mais avant de vous les dévoiler, il serait judicieux de lire la description textuelle de William Arden qui se trouve au Chapitre 2 et ce qu'en fait la traduction de Claude Voilier.

  "[Jupiter] pointed at the stuffed animal in Pete's hands, and the boys really looked at it for the first time. Pete's eyes almost popped in excitement as he examined the prize he held.
  "Wow! It's a beaut, isn't it?"
  It was a stuffed cat almost three feet long, striped red and black. Its legs were all twisted, and the body was crooked like a Z. Its mouth was open showing sharp, white teeth, and one ear dropped sharply down. There was only one wild red eye, and a jewelled red collar. It was the wildest, most crooked-looking cat they had ever seen."
Jacques Poirier, 1974.
  "[Hannibal] montrait de l'index le jouet que Peter tenait toujours. A dire vrai, les trois garçons le regardaient réellement pour la première fois. Ce qu'ils virent alors les laissa un moment sans voix. Puis Peter s'exclama d'un ton ironique: 
  "Pour un prix, c'est un prix! Un véritable prix de beauté! Non, mais, regardez-moi ça!"
  Il fallait reconnaître que le chat était tout bonnement horrible! C'était une sorte de chat-fétiche en peluche, de trente centimères de haut. Il était de couleur noire et portait un collier rouge. Ses pattes ressemblaient à des tire-bouchons. Son corps lui-même était tordu comme un Z. La bouche ouverte de l'animal découvrait des dents blanches et pointues. On eût dit un petit monstre prêt à cracher! L'une de ses oreilles pendait lamentablement. Enfin, il avait des yeux de faïence; grâce à un petit mécanisme, il clignait de l'oeil droit. C'était le chat le plus extravagant qu'ils aient jamais vu!"

  On peut donc relever en quoi le chat français diffère du chat américain: il fait "trente centimètres de haut" au lieu de "trois pieds de long" ce qui après conversion, fait plus de 90 centimètres de long, il n'est plus "rouge et noir" mais juste noir et surtout, très important puisque cela justifie le titre français, au lieu d'avoir un oeil en moins, c'est un "petit mécanisme" qui le fait cligner de l'oeil.
  Petit bonus en passant, j'ai trouvé une 'illustration allemande qui ne correspond pas vraiment non plus avec le texte original:
Illustration allemande.
  A la fin du Chapitre 7, ce qui incite Bob à annuler son rendez-vous chez le dentiste c'est une petite annonce dont je vous livre ci-dessous les deux versions:

WANTED - CROOKED CATS

Special stuffed cats needed for children's home? Must be stripped red-and-black, with crooked body, one eye, red collar. Will pay $25 for any stuffed cat fitting this description. Call Rocky Beach 7-2222.

  ON DEMANDE... DES CHATS EN PELUCHE
  "Particulier recherche pour ses enfants chats en peluche, bourrés de son, couleur noire, avec corps en forme de Z, clignant de l'oeil, collier rouge. il sera payé comptant 25 dollars pour tout animal correspondant à cette description. Appeler ROCKY: 7-2222.

  Excepté sa dimension, on retrouve les même différences dans ses caractéristiques. Là où se trouve une petite incohérence, c'est dans le titre français du Chapitre 8. Le titre original est "Who wants a crooked cat?". Si la traduction veut mettre l'accent sur ce clignement d'oeil qu'elle invente de toute pièce au lieu de l'aspect tordu, biscornu (pour "crooked"), pourquoi le Chapitre 8 s'intitule "On demande... chat borgnes!"? Cela correspond plutôt à la version originale, où il manque un oeil, et où il n'est pas question de quelque "mécanisme" qu'il soit.
  Au Chapitre 10, Jupiter/Hannibal trafique un chat en peluche trouvé dans Le Paradis de la Broquante afin qu'il ressemble peu ou prou à celui demandé dans l'annonce. Et du coup, les différences se répercutent, les détails ne sont pas les mêmes non plus::

  "I knew we had one here," he exulted. "The Jones Salvage Yard has everything!"
  He held up the most dilapidated stuffed cat Bob and Andy had ever seen. it was spotted black and white; its legs were torn, one eye was missing, and the stuffing was coming out [...].
  "Jupiter began to work on the ragged stuffed cat. He used quick drying, brush-on dye, needle and thread, and twisted pieces of wire to reconstruct and repair the cat. He worked quickly and in silence, his eyes bright with purpose [...]
  Half an hour later, Jupiter sat back in satisfaction and buckled a red-dyed colar round the stuffed cat's neck.
  "There! One red-and-black, one eyed, red-collared crooked cat. The wire twists the legs just right, I believe."
Jacques Poirier, 1974.
  "Je l'ai finalement déniché sous une vieille bassine, expliqua [Hannibal]. Je savais bien que nous en avions un quelque part! On trouve de tout au Paradis de la Brocante!"
  Il brandit à bout de bras le plus minable chat en peluche que Bob et Ronny aient jamais vu! C'était un animal blanc et noir, auquel il manquait un oeil et qui perdait du son par maintes déchirures [...].
  "Hannibal, sans perdre de temps, s'attaqua au chat en peluche. Il travaillait vite et bien. Il commença par recoudre les déchirures. Puis il passa de la peinture à prise rapide sur le dos de l'animal.
  [...] Une demi-heure plus tard, Hannibal se rejeta en arrière d'un air satisfait.
  "Et voilà! Un matou en peluche noir, qui cligne de l'oeil et porte un collier rouge. Merveilleux!"

  Ainsi, Claude Voilier omet les fils de fer destinés à donner un aspect biscornu au faux chat et la peinture n'est sous-entendu pas de la même couleur. A l'origine, Jupiter doit peindre des rayures rouges. Dans l'édition française, cela n'est pas précisé, mais on peut déduire que puisque le chat est noir et blanc, Hannibal recouvre le blanc par de la peinture noire. On peut aussi remarquer que le collier rouge n'est mentionné qu'à la fin sans plus d'explications précédemment (il est mentionné par Arden que Jupiter le lui met, mais c'est également omis).
   Sans plus attendre, comme promis, voici les trois couvertures françaises:
Jacques Poirier, Bibliothèque Verte, 1974.
Yves Beaujard, Bibliothèque Verte, 1989.
Yves Beaujard , Bibliothèque Verte, 1996.















NOTES:
  -Le chat est bien noir sur deux d'entre elles. Sur la première version d'Yves Beaujard, il est bleu à cause de la silhouette d'Alfred Hitchcock, déjà noire.
  -La première version d'Y. Beaujard, cartonnée en 1989, est réutilisée en 1992, avec un fond blanc et une
couverture souple.
  -Sur la deuxième version d'Y. Beaujard, il cligne de l'oeil gauche et porte un noeud papillon au lieu d'un collier.
Edition italienne.
  -Sur la couverture de J. Poirier, l'oeil droit est absent comme dans le texte original. Contrairement au deux autres, on ne voit pas les cils ou la paupière fermée censés désigner le clignement.
  -Poirier est encore très imaginatif quant à la silhouette d'Hitchcock puisqu'elle évoque le stand de tir d'Andy/Ronny Carson. Beaujard le transcrit également dans sa première version avec les "clubs de golfs" en éventails (que l'on peut voir plus haut dans l'illustration de Jacques Poirier avec Andy/Ronny faisant montre de ses capacités de bonimenteur).
  -Alors que Poirier figure seulement le voleur du début du roman, Beaujard choisit dans ses deux versions de dessiner outre deux des jeunes détectives, le duo de clowns. Or dans les deux cas, il leur est prêté des postures qu'ils n'ont pas vraiment à l'intérieur du roman. D'autre part, cela préfigure un peu trop le dénouement en affichant d'emblée une importance dissimulée jusqu'à la fin.
  -Seule l'édition italienne place également un clown sur sa couverture... mais pas de chat!

  Cet article est publié avec au moins une semaine de retard par rapport à mes prévisions. J'avais rédigé plus des trois quarts d'une première version quand l'interface Blogger a merdouillé me poussant à une mauvaise manip' fatale... Vous avez donc sous les yeux une seconde version totalement réécrite de mémoire (j'avais perdu toutes les notes prises lors de la lecture du roman!). Bon, l'un des bon côtés, c'est que j'ai trouvé d'autres choses à ajouter, complétant ainsi la première version disparue.  Du coup, je ne sais pas si j'aurais le temps d'écrire l'article suivant avant la fin de sptembre, il sera plus probablement publié début ou mi-octobre.
  Avant de vous quitter, je vous signale que j'ai créé une page Facebook. Je ne sais pas encore trop quoi y mettre, mais ça pourrait permettre à ceux d'entre vous qui le souhaitent de dialoguer (réactions, critiques, suggestions...) avec moi sur mon projet d'une manière plus pratique qu'avec ce blog. Voici le lien. En éspérant vous y voir prochainement...
  Merci à toutes les personnes qui suivent ce projet et tout spécialement à Naé!

14.The Mystery of the Coughing Dragon/11.Le Dragon qui éternuait.
15.The Mystery of the Flaming Footprints/14.L'Aigle qui n'avait plus qu'une tête.
16.The Mystery of the Nervous Lion/21.Le Lion qui claquait des dents.
17.The Mystery of the Singing Serpent/16.Le Serpent qui fredonnait. 

The Secret of the Crooked Cat/Le Chat qui clignait de l’œil, William Arden. Traduit de l'américain par Claude Voilier.

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